le Régime Ecossais Rectifié

Situer et comprendre le RER dans le paysage maçonnique 

L'origine

L’origine de la Franche-Maçonnerie

Dès la plus haute antiquité, nous voyons en orient, les sages que l’Inde a révérés, livrés à la vie de contemplation, faire profession d’être amis des hommes, et se transmettre de générations en générations le dépôt sacré de leurs secrets. 
L’Egypte jeta les premiers fondements de cette sagesse mystérieuse et ses mages s’occupèrent les premiers du bonheur de l’humanité. Ces premiers disciples crurent devoir envelopper leurs leçons du mystère des hiéroglyphes dont ils se réservèrent seuls la clef.
C’est auprès d’eux que les grands esprits de la Grèce allaient subir l’initiation.
Plus tard, au douzième siècle, Hugues de « Payens ou de Païns », songe à une réalisation sociale des principes qui lui ont été confiés.
Il jette en 1118, les bases de l’Ordre du Temple.
Les Templiers travaillèrent à rétablir l’ancienne organisation universitaire. Tous les centres importants devinrent le siège d’un prieuré. Les prieurés relevaient d’un grand prieuré gouvernant la province, et les grands prieurés se groupaient à leur tour par nation ; le tout gouverné par le Grand-Maître.
La Franche-Maçonnerie d’aujourd’hui fonctionne toujours plus ou moins selon ce principe de répartition géographique.
Tous les peuples ainsi englobés recevaient l’impulsion d’un centre unique qui poursuivait leur émancipation par la charité et la science.
En 1307, les Templiers furent brûlés. En 1312, l’Ordre fut détruit par le Pape Clément V.
Plusieurs initiés qui avaient échappés au supplice fondèrent une fraternité internationale qui prépara sourdement la lutte contre le sectarisme papal.
La révolte éclata en Allemagne avec Luther, en 1517. Cette tentative eut un succès prodigieux. Le protestantisme serait une des victoires remportées par la Franc-Maçonnerie sur la papauté.

Après Hugues de Payens, le fondateur des Templiers. Un autre occidental, chrétien Rosenkreuz parcourt successivement la Turquie, la Palestine et l’Arabie et étudie tous les centres d’initiation. De retour en Allemagne, son pays natal, il dévoile sa doctrine à un petit nombre d’initiés et fonde l’Ordre de la Rose-Croix.

Nous verrons au XVIII° siècle, trois éléments distincts : d’abord les restes des Templiers, puis la fraternité de la Rose-Croix avec l’ancienne corporation des Maçons constructeurs d’Allemagne, fonder, par une fusion générale une société plus puissante que tous les précédentes : la Franc-Maçonnerie.

Du IX° au XIV° siècles, les moines avaient le monopole de la construction des grands édifices. Le besoin d’un personnel nombreux les obligea à faire des élèves parmi les laïcs. Bientôt, les élèves constructeurs secouèrent le joug monacal et se constituèrent en corps d’état et monopolisèrent la construction du style gothique. 

Les voies et moyens de ce travail étaient tenus secrets. Ces secrets de l’art étaient communiqués aux ouvriers par les Maîtres et ces ouvriers devenaient alors frères en instruction et compagnon de travail. La construction de basiliques palais etc., pris un tel développement aux XIII°, XIV° et XV° siècles, que les constructeurs durent admettre des apprentis compagnons. 

Nous voyons la formation de la corporation composée d’apprentis, de compagnons et de maîtresL’admission au grade d’apprenti était revêtue d’une grande solennité. On exigeait de l’aspirant le serment sur la bible, de ne jamais révéler aucun des secrets de la corporation, à quiconque ne donnerait de preuve d’avoir droit à les posséder. Pour avoir cette preuve irrécusable on convint de certains signes, attouchements, mots, dialectes, etc.

Une fois par mois, les compagnons se réunissaient près du hangar ou Loge qui contenait les plans et les instruments de travail, d’où l’expression ; tenir logeDans ces tenues de loge si la discussion venait à porter sur des questions du ressort exclusif des compagnons, les apprentis se retiraient. L’acte de quitter ainsi la réunion s’appelait : couvrir la loge, parce qu’alors ce qui se passait dans la loge était couvert d’obscurité pour les apprentis.

Chaque trimestre, les compagnons maitres se réunissaient. Le compagnon maitre qui présidait la loge des apprentis portait le titre de Vénérable, celui qui présidait la loge des compagnons s’appelait Très Vénérable MaitreLe Président de la réunion des Maitres se nommait Respectable Maître.

Les compagnons et les apprentis s’appelaient frèresLes surveillants avaient pour emblème le fil à plomb et le niveau. Le Vénérable Maître avait pour emblème l’équerre, symbole officiel des constructeurs. Telle était l’organisation des ouvriers monopolisateurs de la construction gothique à la fin du XIII° siècle.

Au XIV° siècle, l’Angleterre se couvrit de basiliques, de là l’initiation d’apprentis anglais. Aux enseignements purement techniques on ajouta des enseignements destinés à moraliser les ouvriers. Durant le XV° et le XVI° siècles cette tendance nouvelle de la fraternité en Angleterre, prit un essor considérable. Au XVII° siècle, le style gothique se vit délaissé par le style italien ; le monopole des constructeurs allemands reçut le coup de son arrêt de mort. Pour ne pas disparaitre comme corporation, les libres maçons renchérirent sur les aspirations morales. Nous arrivons maintenant à la fusion, sous un nom nouveau, en une société unique d’une puissance incomparable.

Le 24 juin 1717, Jean-Théophile Desaguiers, naturaliste, Jacques Anderson, ministre protestant, Georges Payne, King, Calvert, Lumden, Magden, Elliot, tous de la Rose-Croix ; convoquèrent dans l’auberge du Pommier, à Londres, les membres des Loges qui se trouvaient en activité. 
Cette réunion avait pour but la fusion de la Fraternité des Maçons libres avec l’Ordre de la Rose-Croix et les Templiers.
Cette fusion fut acceptée à l’unanimité.
La Franc-Maçonnerie naquit de cette acceptation et s’éleva en face de l’église de Rome. Toutes les appellations et les cérémonies furent conservées, et c’est sous le triple classement d’apprenti, de compagnons et maîtres que l’armée nouvelle s’élança à la conquête du monde.

L'origine

L’origine de la Franche-Maçonnerie

Le Régime Ecossais Rectifié, en abrégé : « RER » est un système maçonnique d’essence chrétienne, fondé à Lyon en 1778.
Alors que naissait, en Angleterre et en France, une franche-Maçonnerie qui prenait ses racines sur la tradition du métier de « bâtisseur de cathédrales » ou plutôt du regroupement et de l’organisation des métiers essentiels à la construction des cathédrales, se créait en Allemagne une Maçonnerie qui se prétendait l’héritière de la Tradition Templière.
Il s’agit de la « Stricte Observance templière », un système de hauts-grades maçonniques fondé par le Baron Karl Gotthelf Von Hund. Ce dernier prétendait avoir reçu son initiation de Charles Edouard Stuart, roi d’Ecosse en exil.
Dans ce système Allemand, l’aspect chevaleresque primait absolument sur l’aspect maçonnique, car il se voulait l’héritier et le restaurateur de l’ordre des Templiers disparu près de 400 ans plus tôt (1314) dans les circonstances que l’on connait.
Ce système que l’on appelle « S.O.T. » a très rapidement joui d’un grand et fort développement outre-rhin.
On peut signaler au passage que c’est dans cette structure que furent initiés des frères aussi célèbres que Goethe, Mozart et Haydn.
Des Français avaient adhéré à cette maçonnerie allemande, soit en étant « Initié », soit « rectifié ». ils créèrent alors en France et un peu partout en Europe, des Loges et de Chapitres placés sous la juridiction de la « SOT ».
C’est à cette époque que naît probablement dans l’esprit de Jean-Baptiste Willermoz, une idée de réforme spirituelle de l’Ordre maçonnique qui se livrait à son regard dans le paysage français. Face aux multiples « déviations », il souhaitait un retour aux sources authentiques et morales qui lui semblaient être perdues de vue.
Vers le milieu du 18° siècle, la Maçonnerie française connaissait en effet des écarts, des libertés de fonctionnement et des innovations blâmables.
Certains Frères de la Région Lyonnaise ont donc décidé de retourner à ce qu’ils considéraient comme la véritable maçonnerie des origines. Avec la participation active de frères Strasbourgeois, ils ont alors préparé ensemble, à l’intention des trois Provinces qui avaient vu le jour en France, les rituels et les textes qui allaient constituer le « Corpus » du Rite Ecossais Rectifié.

Les principaux artisans de cette réforme furent le Lyonnais Jean-Baptiste Willermoz et le Strasbourgeois Jean de Turkheim, chacun entouré d’un groupe de frères.
Ils arrivèrent au Convent des Gaules (rendez-vous annuel des francs-Maçons Français) avec leur projet de réforme, dont les démarches et contacts de préparation avaient débuté depuis longtemps.
Il est alors parvenu à force d’un grand et beau travail de « lobbying », à faire adopter le : « Code maçonnique des loges réunies et rectifiées de 1778 » auquel ils ajoutèrent une : « Règle Maçonnique en 9 points ».
Cette réforme, appelée fréquemment : « Réforme de Lyon », menée au cours des convents de 1778 à Lyon puis en 1782, à Wilhemsbad (Allemagne ; pour le niveau européen) a permis la création du « Rite Ecossais Rectifié » en France. Puis peu de temps après, en Italie ou Willermoz avait un solide contact. C’est à wilhemsbad que les rituels et règlements seront refondus et dorénavant exclusivement qualifiés de : « rectifiés ».
On peut noter que quelques temps plus tard, à bout de souffle, la « SOT » s’est éteinte en Allemagne. Cet adjectif « Rectifié » cristallisait à lui seul ce changement profond pour rompre avec la Franche- Maçonnerie de l’époque. Il est synonyme de « Réformé ». Il vient du latin « rectificare », c’est-à-dire : redresser, remettre dans le droit chemin. En outre, ce terme choisi en 1778 symbolisait une refonte complète de la Franche-Maçonnerie en écartant les dérives constatées. Elles sont clairement décrites dans le préambule du « code des loges réunies et rectifiées ».

L'origine

Comprendre le Rite Ecossais rectifié

Ce que l’on appelle le Régime est doté d’une architecture concentrique, par cercles successifs, qui sont au nombre de trois : 

 – la classe symbolique ou Ordre maçonnique, avec ses quatre grades : Apprenti, Compagnon, Maître, Maître Ecossais ; 

 – l’Ordre intérieur, lequel est chevaleresque, avec ses grades, ou plutôt ses étapes, d’Ecuyer Novice – qui est une période probatoire – et de Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte.

 

Ces deux premiers cercles constituent ce que Willermoz appelle les « classes ostensibles » du Régime. Elles empruntent l’essentiel de leurs formes extérieures aux grades maçonniques et chevaleresques en vigueur en France et en Allemagne (usages de ce qu’on appellera plus tard le Rite français, grades « écossais », Stricte Observance) – moyennant des adaptations non négligeables exigées par la doctrine.

 

Vient ensuite un troisième cercle, la « classe secrète » de la Profession et de la Grande Profession, innovation majeure de Willermoz, dans laquelle « les Frères des classes inférieures qui en sont jugés dignes sont initiés, après les épreuves requises, à la connaissance des mystères de l’ancienne et primitive Maçonnerie et sont reconnus propres à recevoir l’explication et le développement final des emblèmes, symboles et allégories maçonniques » (art. 1er des statuts).

 

Ces trois cercles, ou classes, constituent le Régime Ecossais Rectifié. 

Pourtant, enchâssé, en son cœur, se trouve un quatrième cercle, protégé sous le voile du mystère, et qui est le nec plus ultra : l’Ordre des Elus Coëns. 

Mais aucune confusion n’est possible : bien que situé au centre du Régime Rectifié, l’Ordre Coën n’est plus le Régime Rectifié ; en passant de l’un à l’autre, on change de monde. 

 

En particulier, Willermoz s’attache à proscrire, dans les classes du Régime, tout ce qui pourrait s’apparenter fût-ce à une esquisse de pratiques théurgiques, comme la kabbale ou l’alchimie, ces pratiques étant l’exclusivité de l’Ordre Coën.

 

En revanche, ce que les deux, Ordre Coens et Régime Rectifié, ont en commun, c’est la doctrine de la réintégration, cette « science de l’homme », pour reprendre la formule de Joseph de Maistre, que la Maçonnerie a pour fonction d’enseigner et de mettre en œuvre initiatiquement.

 

Sa substance initiatique, et par conséquent, son rituel initiatique, sont entièrement fondés sur : 

1) la chute de l’homme de son état originel glorieux, et 

2) son retour, sa réintégration par l’initiation dans cet état primitif, laquelle initiation, pour pouvoir opérer, exige l’intercession et l’action du « Grand Réparateur », qui est le Christ.

 

Ce thème, Willermoz l’a reçu des enseignements de Martines. Mais il l’a reçu aussi de la lecture des Pères de l’Eglise. En effet, ce que l’on sait peu, c’est que Willermoz avait une solide culture religieuse ; il avait été élève des Jésuites et, en dépit de son activité professionnelle précoce, il ne cessa jamais de chercher à s’instruire, ce qu’il pouvait aisément, puisqu’il y avait plusieurs prêtres dans sa propre famille, sans parler de son entourage maçonnique. 

 

C’est ainsi que le fonds maçonnique de Lyon conserve de ses notes de lecture sur des Pères de l’Eglise, en particulier les Pères grecs (dont les traductions étaient moins rares qu’on le croit communément). 

 

Or le thème de la chute et de la réintégration est ce que les Pères, depuis saint Irénée de Lyon, ont exprimé par le thème de « l’image et ressemblance » : l’homme a été créé à l’image de Dieu et selon sa ressemblance ; la chute lui a fait perdre la ressemblance mais l’image, empreinte divine, demeure inaltérée ; reste à réacquérir ou à reconquérir la ressemblance. 

 

Tel est l’objet et le but de l’initiation : le retour de la difformité à la conformité, de l’état déchu à l’état d’avant la chute.

 

Tout le système élaboré par Willermoz, c’est-à-dire le Régime Ecossais Rectifié, est modelé, et ses formes, adaptées, pour permettre à l’initiation d’opérer de cette façon-là. 

 

En outre, Willermoz, convaincu que l’intelligence est un talent reçu de Dieu – talent que, selon la parabole évangélique, l’homme a le devoir de faire fructifier – double le processus initiatique par un processus pédagogique : il rédige une série « d’instructions » qui se succèdent de grade en grade afin d’exposer de plus en plus clairement et complètement cette doctrine de la réintégration dans tous ses aspects, non seulement anthropologiques, mais cosmologiques et théosophiques. 

 

Ces instructions culminent dans l’Instruction secrète des Grands Profès, où éclate son génie métaphysique, comme d’ailleurs aussi dans celles des « leçons de Lyon » qui sont de son cru ; car il y donne de la métaphysique de Martines une présentation particulièrement lumineuse.

 

Les mêmes qualités : logique, clarté, sens des nuances, qualité de l’expression, caractérisent le Préavis, véritable discours-programme qu’il prononça devant le Convent de Wilhelmsbad le 29 juillet 1782 afin de présenter à la fois le Régime et son inspiration. Willermoz était véritablement aussi doué pour les concepts et pour l’écriture que pour l’organisation ; c’était à l’évidence un esprit de premier ordre.



Ce qu’il importe néanmoins de souligner avec force, c’est que, si Willermoz s’est toujours défendu d’être le véritable auteur des instructions dont il était le rédacteur, il a également cru sur parole Martines lorsque celui-ci affirmait, lui aussi, ne faire que transmettre une très ancienne tradition, quasiment immémoriale. En fait, pour l’un comme pour l’autre, cette tradition, c’est-à-dire à la fois la doctrine, qui est science de l’homme, science de la réintégration de l’homme, et l’initiation qui va avec, sont le fait d’un unique « Haut et Saint Ordre », dont l’origine est aussi ancienne que le monde, et dont aussi bien l’Ordre des Elus Coëns que le Régime Ecossais Rectifié sont des manifestations temporelles, d’où leur harmonie en quelque sorte préétablie. 

« Haut et Saint Ordre » dont la fonction est de rétablir le vrai Temple, le temple de l’Homme où réside l’Esprit, par et dans le Christ – autre manière de décrire la réintégration.

Les valeurs et les principes

L'approche humaine du Rite Ecossais rectifié

Cette nouvelle Maçonnerie est une société qui cultive la morale et qui transcende l’approche chrétienne au-delà des églises et des dogmes en se référant aux principes les plus purs des Traditions antérieures.

Cette réforme aboutit à une synthèse et à une simplification : elle revient aux origines les plus anciennes de ce que Joseph de Maistre a appelé : « La science de l’homme », tout en écartant avec force les éléments hermétiques, thaumaturgiques ou alchimistes qui avaient cours dans ce XVIII° siècle des « lumières ».

Cette réforme se veut Maçonnique et chevaleresque avec une tendance proche d’une gnose johanique, c’est-à-dire chrétienne.

Jean-Baptiste WILLERMOZ

Observateur et Fondateur du Rite

Jean-Baptiste Willermoz, né à Lyon le 10 juillet 1730 et mort dans la même ville le 29 mai 1824, fut un Maçon d’une envergure exceptionnelle, comme il ne s’en rencontre pas beaucoup par siècle.

C’est indéniablement une des personnalités les plus éminentes et les plus considérables de l’histoire de la Maçonnerie – surtout de la Maçonnerie française, mais pas uniquement d’elle, et qui exerça sur son évolution une influence déterminante.

Véritable père fondateur du Régime Ecossais Rectifié, il fut l’architecte en chef d’un édifice qui subsiste encore durablement malgré d’étonnantes vicissitudes. Il a longtemps été de mode d’adopter à son sujet un ton dénigrant et persifleur, qu’on retrouve à l’envie sous la plume de Paul Vulliaud, d’Alice Joly, de René le Forestier, de Pierre Chevallier… 

 

Le tournant fut pris en 1973 lorsque, dans son Esotérisme au XVIIIe siècle, Antoine Faivre, le premier, écrivit : « On peut dire qu’il atteignit une haute spiritualité et que sa largeur de vue était peu commune. Il se montra doué autant pour la méditation et l’illumination intérieure que pour l’organisation ou l’administration. La Révolution a failli être fatale à son œuvre ; mais on le considère toujours comme l’un des plus grands personnages de l’histoire maçonnique. » (p 176). Depuis lors, en particulier avec la remise au jour de nombreux documents d’archives, la grandeur du personnage s’est imposée de plus en plus.

Issu d’une ancienne famille de bourgeois de Saint-Claude (dont le patronyme s’orthographiait originellement Vuillermoz), et qui était, d’après des documents de famille, d’origine espagnole lointaine, son père s’était installé à Lyon comme marchand mercier. Jean-Baptiste, aîné de douze frères et sœurs, fut très jeune projeté dans la vie active : mis en apprentissage auprès d’un commerçant en soieries à l’âge de 14 ans, il monta à 24 ans sa propre manufacture ; peu avant Wilhelmsbad, une notice le décrit comme « fabricant en étoffes de soie et d’argent et commissionnaire en soieries. » 

Il vendit son établissement en 1782 tout en conservant des intérêts dans la maison de mercerie en gros de son frère Antoine et de son beau-frère Pierre Provensal, époux de sa sœur aînée Claudine. 

Même s’il consacra à la Franc-Maçonnerie l’essentiel de sa longue vie, il s’engagea activement dans la vie de la cité en se conformant à l’esprit des règles qu’il avait lui-même édictées pour les Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, c’est-à-dire en mettant ses facultés d’organisateur et d’administrateur au service de la religion et de la bienfaisance au sens large du terme : il fut successivement ou simultanément administrateur de l’hôtel dieu (notamment durant la période périlleuse de la Terreur, en 1793) puis des hospices civils de Lyon, membre du conseil de fabrique (c’est-à-dire du conseil paroissial) de Saint-Polycarpe, conseiller général du département du Rhône, il s’occupa d’instruction primaire, devint agriculteur passionné… 

Willermoz fut tout sauf un Maçon en chambre. 

C’est néanmoins par son œuvre maçonnique qu’il est passé à la postérité. Initié en 1750 à l’âge de 20 ans dans une loge dont on ignore le nom, il franchit très rapidement tous les échelons. Elu Vénérable à peine deux ans plus tard, en 1752, il ressent la nécessité de mettre de l’ordre dans une situation marquée « par des abus qui s’accréditaient de plus en plus » et il contribue à former, en 1760, la Grande Loge des Maîtres Réguliers de Lyon, reconnue en 1761 par la Grande Loge de France. 

Après en avoir été le Président en 1762-63, il obtient d’en devenir le « Garde des sceaux et archives », fonction qui devait avoir ses préférences dans tous, ou presque tous, les organismes auxquels il appartint car, tirant parti de la correspondance d’affaires qu’il entretenait avec l’Europe entière, il pouvait ainsi se livrer à une de ses activités favorites : recueillir, étudier et comparer les rituels de tous les grades possibles. 

Et cela indubitablement par goût de collectionneur, mais aussi pour des raisons bien plus profondes, qu’il exposera dans une lettre de novembre 1772 au baron de Hund, le fondateur de la Stricte Observance : « Depuis ma première admission dans l’Ordre, j’ai toujours été persuadé qu’il renfermait la connaissance d’un but possible et capable de satisfaire l’honnête homme. D’après cette idée, j’ai travaillé sans relâche à le découvrir. Une étude suivie de plus de 20 ans, une correspondance particulière fort étendue avec des frères instruits en France et au dehors, le dépôt des archives de l’Ordre de Lyon, confié à mes soins, m’en ont procuré bien des moyens… » 

Et il constitue, à l’effet d’étudier tous les « hauts grades » dont il se procurait la connaissance et d’en être en quelque sorte le « laboratoire », une fois averti des secrets du grade de Rose-Croix, en 1763, Willermoz fonde, à Lyon, le « Chapitre des Chevaliers de l’Aigle Noir, Rose-Croix » ; c’est certainement le plus ancien Chapitre Rose-Croix d’existence officialisée. C’est un chapitre réservé à une « petite société » qu’il fonde en compagnie de son frère Pierre-Jacques et qui s’intéresse à la recherche alchimique.

Il poursuit, à Lyon, une œuvre considérable de documentation sur tous les grades maçonniques en vue de leurs synthèses en un système harmonieux et ordonné. Il déclare, en 1761, pratiquer 25 grades dont celui de Chevalier de l’Aigle, du Pélican, de Saint-André ou Maçon d’Hérédon, c’est-à-dire Rose-Croix.

Pendant de longues années, il pratique « les opérations alchimiques » et travaille sur « le traité de la réintégration ».

Toute la pensée de Jean-Baptiste Willermoz assigne comme objectif suprême à la Franc-Maçonnerie : L’alchimie mystique. Il le précise lorsqu’il déclare : « qu’un seul homme a connu et pratiqué complètement la vraie science maçonnique et cet homme n’est autre que Jésus-Christ » (Lettre à Waetcher du 31 janvier 1782).

Le but de ces recherches, à savoir le véritable but de la Franc-Maçonnerie, lui fut révélé lorsqu’il fut admis en mars 1767, par Martines de Pasqually en personne, dans son Ordre des Chevaliers Maçons Elus Coëns de l’Univers. 

Dans une lettre, également de 1772, à un autre dignitaire de la Stricte Observance, le baron de Landsperg, Willermoz s’en explique avec discrétion mais avec netteté : « Quelques heureuses circonstances me procurèrent l’occasion dans mes voyages d’être admis dans une société bien composée et peu nombreuse, dont le but qui me fut développé hors des règles ordinaires me séduisit. Dès lors tous les autres systèmes que je connaissais (car je ne puis juger ceux que je ne connais pas) me parurent futiles et dégoûtants. C’est le seul où j’ai trouvé cette paix intérieure de l’âme, le plus précieux avantage de l’humanité, relativement à son être et à son principe. » 

De fait, convaincu d’avoir découvert la vérité de la Maçonnerie, Willermoz ne s’en départira jamais et demeurera inébranlablement fidèle, en dépit des apparences, et quoi qu’on ait prétendu, à son initiateur Martines, à sa doctrine et à son Ordre. 

Après l’avoir reçu, comme il vient d’être dit, au cours d’une cérémonie empreinte d’émotion (que Willermoz devait relater en 1781 à Charles de Hesse), le Grand Souverain, qui avait décelé ses capacités, le nomma peu après « Inspecteur général de l’Orient de Lyon et Grand Maître du Grand Temple de France ». En mai 1768, le Substitut Universel de l’Ordre des Elus Coëns, Bacon de la Chevalerie l’ordonna Réau-Croix ; bien que cette ordination ait été opérée sur autorisation de Martines, celui-ci éprouva des doutes sur sa parfaite régularité, et il décida de la confirmer deux ans plus tard, en mai 1770, par la « voie sympathique », c’est-à-dire à distance – méthode fréquente pour les opérations des Elus Coëns, notamment les travaux d’équinoxe.

Willermoz prit très au sérieux les fonctions qui lui avaient été conférées et, méticuleux comme il l’était, il fut, parmi les disciples de Martines, le plus pressant pour obtenir de lui des rituels, instructions et autres documents qui faisaient défaut aux Coëns pour travailler ; à cet égard, sa correspondance avec Louis Claude de Saint-Martin, lorsque celui-ci fut devenu secrétaire de Martines, est des plus précieuses, de même que les notes que lui-même établit pour la pratique des rituels coëns. 

Par dérogation à la règle qu’il s’était imposée pour les autres systèmes, y compris le sien, à savoir le Régime Ecossais Rectifié, il tint à conserver la conduite du Temple de Lyon, et il le maintint en effet en activité bien après la désagrégation de l’Ordre des Elus Coëns, jusqu’aux premiers troubles de la Révolution. 

Preuve du respect révérencieux que Willermoz portait à l’œuvre de son maître, il n’apporta aucun changement, même léger, à l’Ordre des Elus Coëns, qu’il laissa complètement à l’écart de sa grande entreprise de réforme – de rectification – de la Maçonnerie.

Enfin, en ce qui concerne l’homme, en dépit des tiraillements ou des agacements réciproques, inévitables de la part de personnes aux natures aussi caractérisées et aussi contrastées, il lui porta toujours la plus grande considération en tant que maître initiateur, écrivant à son sujet, dans son extrême vieillesse, en 1821 : « Cet homme extraordinaire auquel je n’ai jamais connu de second. »

Sa devise était « L’Union fait la force« . Elle pourrait avoir influencé celle de la Belgique dont de nombreux Francs-Maçons figuraient parmi les Constituants de 1830.

En 1782, Willermoz écrit qu’il distingue trois sortes de maçons alchimistes :

  • Ceux qui pensent que le but de la maçonnerie est la fabrication de la Pierre philosophale.
  • Ceux qui recherchent la Panacée.
  • Ceux qui recherchent la Science du Grand Œuvre, par lequel l’homme retrouverait la sagesse et les pratiques du christianisme primitif (courant dans lequel il s’inscrivait).

Figurant parmi les figures importantes du martinisme, même s’il a laissé peu d’écrits, on trouve dans un petit recueil intitulé Mes pensées et celles des autres, un texte magnifique dans lequel il souligne la complémentarité de l’étude intellectuelle et de la pratique spirituelle : « L’étude sans la prière, a dit autrefois un sage, est un véritable athéisme, et la prière sans l’étude une vaine présomption. C’est-à-dire que celui qui croit pouvoir acquérir une vraie lumière par l’étude et par la seule force de son application, pense et agit comme un athée et que celui qui présume que pour obtenir la connaissance de la vérité, il lui suffit de la demander dans ses prières, sans faire aucun effort pour la découvrir et sans méditer sur ses voies, n’est qu’un homme présomptueux, lâche ou indifférent pour elle. Le premier n’acquerra qu’une science vaine et dangereuse, l’autre restera dans l’ignorance. »

Jean-Baptiste Willermoz nous a laissé un témoignage de sa pratique spirituelle. En effet, dans le fonds Willermoz de la bibliothèque municipale de Lyon, se trouve un petit recueil couvert d’une étoffe ancienne, composé de 175 feuilles écrites de sa propre main. On peut y lire le texte des Prières des six heures des élus coëns, suivies des Prières particulières pour l’ordre des élus coëns, pour les trépassés, parents et amis, pour le roi et la prospérité du royaume. L’ouvrage se termine par la Prière qu’on doit faire quand on est couché et prêt à dormir. La référence faite par l’une de ces prières au jeune monarque Louis XVI permet de dater ce recueil des années 1774-1785. Ces textes ont été publiés en 1980-1981 dans la revue Renaissance Traditionnelle.

Que ce soit chez Martines de Pasqually, Louis-Claude de Saint-Martin ou Jean-Baptiste Willermoz, la prière occupe donc une place fondamentale. On peut même aller jusqu’à dire qu’elle constitue probablement le cœur de la voie martiniste. Lors d’une conversation, Robert Amadou disait d’ailleurs qu’il n’était pas impossible que la théurgie des élus coëns n’ait été qu’une étape préliminaire à une élévation plus haute que les émules de Martines cherchaient à obtenir au moyen de la prière.

C’est que Willermoz avait adhéré d’emblée, et définitivement, à la doctrine de la réintégration, doctrine dont il estima dès lors qu’elle avait été, et devait être toujours, à la base de la Maçonnerie primitive et authentique ; si elle était absente de tel ou tel système maçonnique, c’était la marque que celui-ci était « futile ou dégoûtant » ou encore « apocryphe », disait-il en empruntant le terme et l’idée à Martines. 

La découverte de la doctrine de Martines ne dissuada nullement Willermoz de continuer ses enquêtes sur tous les systèmes maçonniques qui venaient à sa connaissance et de solliciter de ses nombreux correspondants, souvent princiers, tel Charles de Hesse, des échanges de « lumières ». Mais on s’est complètement mépris sur le sens de ces démarches, qu’on a présentées comme une quête incessante et toujours inassouvie de la vérité. Rien n’est plus erroné. Cette vérité, Willermoz était convaincu de l’avoir reçue, et elle le satisfaisait entièrement. S’il continuait à la chercher ailleurs que dans l’Ordre de Martines, c’était dans un tout autre but : celui de réunir en un faisceau tous les systèmes maçonniques authentiques – authentiques parce que, par hypothèse, ils véhiculaient la même doctrine, ou encore, pour reprendre une image qu’il utilisa souvent, pour réunir les branches issues d’un même tronc. Cette « réunion générale de tous les rites et systèmes maçonniques » était une idée qui le poursuivit longtemps et qu’il exposa publiquement devant le Convent de Wilhelmsbad ; et elle trouva son écho dans la titulature officielle des Loges du Régime Ecossais Rectifié, qui est : « Loges réunies et rectifiées de France ». 

Ce n’est pas autrement qu’il faut interpréter son adhésion et celle des deux groupes dont il était le principal inspirateur, à Strasbourg et à Lyon, à la Stricte Observance, dite encore Maçonnerie réformée ou rectifiée de Dresde. Cette adhésion se fit sur la base d’un quiproquo complet : lorsque le baron de Weiler, émissaire de Charles de Hund, parlait de « rétablir l’Ordre dans son premier état », il sous-entendait par là le rétablissement de l’Ordre du Temple aboli en 1313, là où Willermoz comprenait le retour à la Maçonnerie primitive telle que Martines l’enseignait ; aussi avoua-t-il plus tard à Charles de Hesse être « tombé de son haut » en ne trouvant dans la Stricte Observance « qu’un système sans bases et sans preuves » et qu’une « profonde ignorance sur les choses essentielles ». 

La preuve – s’il en était besoin – du prix que Willermoz attachait à la doctrine de Martines est qu’il ressentit la nécessité, après le départ pour Saint-Domingue du Grand Souverain, puis sa mort, d’organiser chez lui, à Lyon, de janvier 1774 à octobre 1776, des « instructions » ou « leçons » auxquelles Saint-Martin, d’Hauterive et lui-même participèrent tantôt comme instructeurs, tantôt comme secrétaires de séance. 

Cependant, à quelque chose malheur est bon. La parfaite connaissance que Willermoz avait du panorama maçonnique français et européen l’avait assez vite persuadé que le système de Martines était vraiment trop hétérogène par rapport à la Maçonnerie du temps pour pouvoir s’implanter durablement, a fortiori pour supplanter les autres. Cela tenait, pour le fond, à la doctrine et, pour la forme, au fait qu’il était en vérité une crypto-maçonnerie ou, si l’on peut dire, une « Maçonnerie au-delà de la Maçonnerie ». Or pourtant, selon Willermoz, la doctrine était la seule vraie, la seule à exprimer l’authentique vérité de la Maçonnerie.

C’est alors qu’il eut l’idée géniale de constituer son propre système qui transmettrait, à la fois par l’enseignement et par l’initiation, cette vérité et qui, de surcroît, protègerait en son for intérieur l’Ordre des Elus Coëns. 

Lorsqu’il mourut en 1824 à l’âge vénérable de 94 ans, peut-être Willermoz eut-il le sentiment que son œuvre s’éteindrait avec lui, voire qu’elle s’était déjà éteinte avant lui. On sait qu’il n’en fut rien, et que le Régime Ecossais Rectifié, dans toutes ses classes, reprit plus tard vigueur, sans parler de l’Ordre des Elus Coëns. 

Cela excède le champ de la présente.

A sa mort, les membres du RER se dispersèrent et disparurent peu à peu. Une étude attentive de l’histoire de notre rite à travers le XIX siècle et le XX siècle montrerait comment des hommes ont voulu rester fidèles aux principes spiritualistes et au symbolisme de la Franc-Maçonnerie Mystique, malgré une politisation favorisée par l’unification maçonnique, sous l’égide du Grand Orient, dans les premières années du siècle.

Le RER qui s’était surtout maintenu en Suisse, où il est toujours solidement représenté, fût réveillé en France grâce à Camille Savoire et Edouard de Ribeaucourt, ce qui aboutit à la constitution d’une obédience nouvelle, qui prit le nom en 1945 de Grande loge Nationale Française.

On peut maintenant dire – ce qui n’était pas forcément vrai il y a seulement deux cents ans – que l’œuvre de Willermoz est toujours, et même plus que jamais, d’actualité.

La famille de Willermoz

Source : J.-B. Willermoz - Les Sommeils étude de Émile DERMENGHEM - LA CONNAISSANCE - Les documents ésotériques - 9, galerie de la Madeleine paris XIII 1926

Jean-Baptiste Willermoz, naquit à Lyon le 10 juillet 1730. Son grand-père, Claude-pierre Vuillermoz, époux de Marie Chappel, était sculpteur sur bois, tourneur, à saint Claude. Claude-pierre descendait lui-même d’une vieille famille franc-comtoise : son grand-père Pierre Vuillermoz était, vers 1600, bourgeois de Saint Ouyant de joux : son père, François Vuillermoz, tourneur avait obtenu en 1656 des lettres de bourgeoisie à saint Claude.

Deux des fils de Claude-pierre vinrent s’établir à Lyon vers 1720, l’un, Claude-catherin comme marchand mercier, l’autre Claude Henri, comme marchand tabletier. Un troisième, Léonard, était prêtre, il fut vicaire à saint-Nizier de Lyon. Le nom s’écrit désormais Willermoz.

Claude-catherin épousa en 1728, à 27 ans, Marguerite Valentin, âgée de 23 ans, fille d’un commerçant du Velay. Ils eurent 13 enfants, parmi lesquels Claudine-Thérèse (1) (1729-1810, l’ainée, mariée en 1749 à Pierre Proüensal (1755-1799), Antoine (1741-1793) guillotiné sous la terreur, plusieurs fils morts jeunes et plusieurs filles dont il est parlé dans « les sommeils ».

 

 

(1) c’est d’elle qu’il est question dans les sommeils et dans la correspondance de Saint Martin. Elle joua un rôle dans le mouvement martiniste et partageait les idées de son frère.

Dès cette époque la famille Willermoz se place dans la meilleure bourgeoisie de Lyon et sa situation ne fit que s’accroître par la suite. Les affaires de Claude-Catherin prospérèrent jusqu’à sa mort en 1770. Son fils Antoine, qui avait été son associé lui succéda. Pierre-Jacques s’installa à Lyon comme médecin, après avoir fait ses études à Montpellier.

Jean-Baptiste Willermoz devenu « fabricant d’étoffes de soies et d’argent » et « commissionnaire en soieries » montra une aptitude remarquable aux affaires. Non seulement il développa la maison paternelle, mais il sut par ses propres forces, au milieu des troubles de la fin du siècle, édifier une nouvelle fortune. Il était à sa mort l’un des gros négociants et propriétaires fonciers de la ville.

Ses facultés d’organisateur ne sont pas moins remarquables et lui valurent, nous le verrons, une certaine place de premier rang dans les sociétés secrètes de Lyon, de France et même d’Europe. C’est justement ce mélange de réalisme pratique et d’idéalisme mystique qui semble le trait le plus frappant de son caractère. Cet homme de «taille élevée», dont le visage «portait l’empreinte de la douceur unie à la dignité», dont les discours étaient «graves», la «parole lente et solennelle», l’activité dévorante, unit l’autorité à la résignation ; et sa «Foi vive», sa «conviction profonde des vérités de la religion qu’il cherchait sans cesse à faire pénétrer dans le cœur de ceux qui l’écoutaient» (sa vie fut un prosélytisme perpétuel), n’empêchent pas la hardiesse d’une pensée, large et aventureuse, qui cherche toujours 2au delà», et voudrait concilier le dogme orthodoxe avec l’ésotérisme audacieux. Ce double aspect de son caractère se retrouve même dans les écrits. Les sommeils sont une suite de procès-verbaux scientifiques, objectifs, calmes et minutieux ; les lettres ouvrent des aperçus sur les plus abstruses spéculations.

Le rite de nos jours

Observateur et Fondateur du Rite

La grande Loge de Genève a été créée en juin 1769. La Loge la Discrétion a été fondée à Zurich le 13 août 1771.

En 1773, il y a deux loges situées en « territoire étranger » faisant partie de la Grande Loge de Genève. L’une d’elle est : la Discrétion à Zurich. Une patente constitutive, datée du 20 avril 1772, signée par Vernet en qualité de Secrétaire de la Grande Loge Nationale (sic) de Genève, fut adressée aux Frères de Zurich, mais ils ne la reçurent officiellement que le 17 juillet suivant.

Le développement de la Stricte Observance en Suisse, à partir de la fin de l’année 1772 est d’une importance capitale dans la « Vie » de la Discrétion.

Ces débuts ont pour acteurs principaux Diethelm Lavater, un jeune étudiant en médecine, et Andreas Buxtorf, un négociant et Ratsherr (Conseiller municipal, conseiller ou ministre…) bâlois. En arrière-plan, l’un des plus importants membres de la Stricte Observance en Allemagne, Johann Christian Schubart, dont l’influence considérable s’exercera à distance, au moyen de sa correspondance avec Lavater.

Les circonstances dans lesquelles la Discrétion fut « rectifiée » par Diethelm Lavater, – c’est-à-dire adopta les système templier de von Hund, système qui, entre 1764 et 1768, devait s’intituler Stricte Observance sous l’influence de Johnson jusqu’au Convent de Kohlo – ou la loge abandonna son titre distinctif primitif de la Discrétion et prit le nom de zur Bescheidenheit ou Modestia, sont assez confuses.

D’Allemagne où il avait fait des études de médecine, Diethelm Lavater était rentré à Zurich le 2 juin 1767. Il avait alors vingt-trois ans. Initié à Erlangen en 1765, il avait reçu l’année suivante les IV° et V° grades de la Stricte Observance. Schubart l’avait reçu Armiger (écuyer) dans l’Ordre Intérieur, le 21 avril 1767, à Leipzig. De 1767 à 1772, Lavater ne semble pas avoir eu d’autre activité maçonnique que sa correspondance, notamment avec Andreas Buxtorf. On ne sait pas ce qui amena, au mois de février 1768, les deux Francs-Maçons suisses à s’écrire. De 1768 à 1778, ils échangeront une soixantaine de lettres. Ne serait-ce que par le truchement des idées qu’il exposera à Lavater, Buxtorf exercera une influence certaine sur les débuts et la diffusion de ce qui deviendra la Maçonnerie rectifiée (au sens Stricte Observance) en Suisse.

Entre 1769 et 1771, Buxtorff, par échange épistolaire exerce une énorme action de lobbying auprès de Lavater pour qu’il rejoigne la SO avec les frères de la Discrétion. Son objectif étant d’établir en Suisse avec une loge de Bâle déjà en activité, une Préfecture de la SO. Lavater fini par se laisser convaincre et entame à son tour, une campagne d’influence auprès des Frères de la Discrétion.

Vous avez des questions ?

« La franc-maçonnerie intrigue depuis des siècles et nourrit parfois des idées reçues. Est-ce une société secrète ? Une religion ? Un cercle fermé réservé à quelques-uns ? Autant de questions que beaucoup se posent sans toujours trouver de réponses fiables.
Notre objectif ici n’est pas de tout dévoiler – car certaines choses doivent se vivre plutôt que se lire – mais de lever le voile sur les interrogations les plus courantes. Cette FAQ vous permettra de mieux comprendre l’esprit, les valeurs et la réalité d’une démarche maçonnique, loin des clichés. »

La franc-maçonnerie, une religion ?

Non. La franc-maçonnerie n’est pas une religion et n’impose pas de dogme. C’est une fraternité qui réunit des personnes de toutes croyances (ou sans croyance) autour de valeurs comme l’humanisme, la liberté de conscience et la solidarité.

Ce n’est pas un secret, c’est de la discrétion. Les membres parlent librement de leur appartenance, mais certains rituels et symboles restent réservés aux initiés pour garder une dimension de vécu et de transmission. 

Pas du tout. Les loges maçonniques accueillent des personnes de tous horizons sociaux et professionnels. L’idée n’est pas d’avoir un statut, mais de travailler sur soi et avec les autres pour progresser ensemble et contribuer à une société plus fraternelle.